« Cela peut paraître curieux », écrit Théophile Penndu dans son livre « Jésus Sauveur », « de proposer comme guide, à ceux qui veulent parvenir au bonheur, un homme qui a été rejeté, qui est mort comme un criminel sur une croix. Mais grâce à leur foi en la résurrection, les chrétiens affirment que Jésus nous sauve, que sa vie n’est pas un échec et qu’elle aboutit à une vie de bonheur sans fin également promise à ceux qui accepteront de vivre comme lui ».

Deux discours doivent donc sans cesse être présents à notre esprit, car avec le Christ, ils ne font qu’un… Jésus, en effet, parlera de « béatitude » tout en évoquant des situations de souffrance, et il invitera ses disciples à prendre leur croix à sa suite pour trouver avec elle la joie du salut… Autant de situations paradoxales dont le point de convergence est à chercher dans la dynamique de Dieu Lui-même : celle de l’Amour qui accepte de peiner, de souffrir pour le seul bien des autres… Jésus en fut le parfait exemple, car, dit-il lui-même, « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » (Jn 15,13)… Et c’est ce qu’il fera, Lui, vrai Dieu « fait chair » (Jn 1,14), et cela « pour tous les hommes qu’il aime » (Lc 2,14).

Dieu avait autrefois révélé son Nom à Moïse, dans l’épisode du buisson ardent, « Je Suis » (Ex 3,14). St Jean précisera par deux fois : « Dieu Est Amour » (1Jn 4,8.16). Et il reprendra abondamment ce verbe « être » au tout début de son Evangile pour présenter Celui qu’il appelle « la Parole » : Jésus, le Fils du Père, fruit d’une Parole éternelle du Père à son égard, un « Je t’aime » dit en acte par un Don total de Lui-même. « Le Père aime le Fils et il a tout donné en sa main » (Jn 3,35). « Tu es mon Fils bien aimé, en toi j’ai mis tout mon amour » (Mc 1,11), c’est-à-dire, tout ce que je Suis… Et c’est par ce Fils à qui il se donne de toute éternité par Amour, l’engendrant ainsi en Fils « né du Père avant tous les siècles, Dieu né de Dieu » (Crédo), que le Père nous créera à notre tour. Nous sommes ainsi le double fruit de l’amour : amour éternel du Père pour son Fils, amour du Fils pour chacun d’entre nous. « Au commencement était la Parole », le Fils, « et la Parole était auprès de Dieu », le Père, « et la Parole était Dieu », tout comme le Père. « Tout fut par Lui », le Fils, « et sans Lui rien ne fut » (Jn 1,1-3)…

Ainsi, tout comme nous avons tous été créés gratuitement par ce Fils qui Est Amour, qui n’Est qu’Amour, nous sommes tous également sauvés gratuitement par ce même Fils, et cela encore une fois par Amour… « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime »… Amour du Fils pour chacun d’entre nous, un Amour qui nous dit également celui du Père : « Dieu en effet a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils Unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais ait la vie éternelle. Car Dieu n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour condamner le monde, mais pour que le monde soit sauvé par Lui ». (Jn 3,16-17). « En vérité, en vérité », disait Jésus, « non, ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain qui vient du ciel; mais c’est mon Père qui vous donne le pain qui vient du ciel, le vrai ; car le pain de Dieu, et Je Suis le Pain de Vie, c’est celui qui descend du ciel et donne la Vie au monde », gratuitement, par amour, à quiconque accepte de la recevoir (Jn 6,32-35). Cela suppose, bien sûr, de renoncer à tout ce qui est contraire à cette Vie… Mais « voilà ce qui est bon et ce qui plaît à Dieu notre Sauveur, Lui qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité. Car Dieu est unique, unique aussi le médiateur entre Dieu et les hommes, le Christ Jésus, homme Lui-même, qui s’est livré en rançon pour tous » (1Tm 2,3-6), par amour… Oui, « nous croyons en celui qui ressuscita d’entre les morts Jésus notre Seigneur, livré pour nos fautes et ressuscité pour notre justification » (Rm 4,24-25).

En se livrant entre les mains des pécheurs, Jésus avait donc conscience d’ouvrir les portes du Ciel à quiconque acceptera de se repentir de tout cœur, à l’image du bon larron crucifié à ses côtés : « Pour nous », un tel sort « est justice », disait-il, « nous payons nos actes ; mais lui il n’a rien fait de mal. Et il disait : Jésus, souviens-toi de moi, lorsque tu viendras avec ton royaume. Et Jésus lui dit : En vérité, je te le dis, aujourd’hui tu seras avec moi dans le Paradis » (Lc 23,39-43).

Dieu veut que tous les hommes soient sauvés ? Le Père a donné au Fils le monde entier pour qu’il le sauve ? « Je suis descendu du ciel », nous dit Jésus, « pour faire non pas ma volonté mais la volonté de celui qui m’a envoyé. Or c’est la volonté de celui qui m’a envoyé que je ne perdre rien de tout ce qu’il m’a donné, mais que je le ressuscite au dernier jour. Oui, telle est la volonté de mon Père, que quiconque voit le Fils et croit en lui », s’ouvre à lui, l’accueille librement dans son cœur et dans sa vie, « ait la Vie éternelle et je le ressusciterai au dernier jour » (Jn 6,38-40).

« Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ». Jésus a ainsi donné sa vie pour chacun d’entre nous, gratuitement, par amour… Maintenant, il attend, il désire, il espère que tous les hommes, librement, car il ne peut y avoir d’amour vrai sans liberté, lui diront tout simplement un « oui » de tout cœur… Ce « oui » ne demande qu’un désir sincère de faire la vérité, vérité sur notre condition humaine blessée, pécheresse, avec toute sorte de mal qui peut habiter notre vie. Mais si ce constat est fait de tout cœur, dans une attitude d’offrande à Dieu, alors « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » (Jn 1,19) l’enlèvera de fait bien vite pour ne laisser à sa place que Paix et Plénitude de Vie. « Que celui qui exerce la miséricorde le fasse en rayonnant de joie » (Rm 12,8). Ainsi est Dieu, heureux, par Amour, de nous délivrer de tout ce qui nous attriste, nous plonge dans la souffrance, nous prive de la Plénitude de sa vie et de sa Paix… Oui, le Christ est heureux de pouvoir mettre en œuvre l’infini de sa Miséricorde toute puissante, heureux de pouvoir déployer tous les trésors de grâce qu’il nous a déjà donnés en s’offrant pour chacun d’entre nous sur une Croix… « Je suis venu pour qu’on ait la vie et qu’on l’ait en surabondance… Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé… Le salaire du péché c’est la mort, mais le don gratuit de Dieu c’est la vie éternelle dans le Christ Jésus » (Jn 10,10 ; Rm 5,20 ; 6,23). Alors, « heureux », bienheureux, dès maintenant, dans la foi, « ceux qui ont cru sans avoir vu  » (Jn 20,29) en l’Amour Infini et Inconditionnel, ceux qui comptent et espèrent en Lui, car « ils ne seront pas déçus » (Ps 22(21),6)…

 

Prions

Seigneur Jésus, par ton Amour déjà donné, aide-nous à ne pas avoir peur de regarder en face tout ce qui ne va pas dans notre vie, et aide-nous encore à te l’offrir. Car ton seul désir est de nous libérer, de nous guérir de tout ce qui nous empêche encore de participer à la Plénitude de ta Vie, toi qui ne recherche et ne poursuit que notre Bien à tous. Et en découvrant l’incroyable profondeur de ta Miséricorde à notre égard, ta Paix toujours offerte, Source du seul vrai Bonheur, fais que nous puissions aider à notre tour le plus grand nombre à l’accueillir, par notre témoignage, et cela pour leur plus grand Bonheur…

 

Diacre Jacques Fournier, Vendredi Saint, 14 avril 2017

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