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Lorsque le prophète Isaïe écrit ces lignes, il s’adresse au roi Achaz (736 – 716 av JC) et lui annonce la naissance prochaine d’un fils, certainement Ezéchias (716 – 687 av JC) : « Voici, la jeune femme » (elle s’appelait Abija) « est enceinte, elle va enfanter un fils et elle lui donnera le nom d’Emmanuel » (Is 7,14), qui signifie « Dieu avec nous »… Mais le règne d’Ezéchias sera décevant ; il délaissera la foi d’Israël pour se tourner vers les idoles égyptiennes… C’est pourquoi, les oracles d’Isaïe le concernant seront repris par les générations suivantes pour nourrir l’espérance en la venue d’un Messie… Et St Matthieu reprendra ce texte d’Is 7,14 pour l’appliquer à Jésus (Mt 1,18-25)…

« Un fils nous a été donné »… Deux fois dans l’Evangile, une voix viendra du Ciel pour dire à propos de Jésus : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé » (Mc 9,7 ; 1,11). Petit à petit, ses disciples prendront ainsi conscience qu’il n’est pas seulement un grand prophète (Lc 24,19), mais ce Fils qui, « avant tout commencement, était auprès de Dieu », son Père (Jn 1,1-4), Lui-même étant aussi « de condition divine » (Ph 2,6). « Mon Seigneur et mon Dieu », lui dit St Thomas (Jn 20,28).

Plus de quarante fois dans l’Evangile selon St Jean, Jésus se présentera comme étant « l’envoyé du Père » (Jn 3,17 ; 4,34 ; 5,23…). Mais il est encore plus à nos yeux : il est le « donné par le Père » : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour condamner le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé » (Jn 3,16-17). Et lorsque, plus tard, Jésus se présentera comme étant le Pain de Vie, il dira : « En vérité, en vérité, je vous le dis, non, ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain qui vient du ciel ; mais c’est mon Père qui vous le donne, le pain qui vient du ciel, le vrai… Je suis le pain de vie » (Jn 6,32-35).

Jésus a donc conscience qu’il est donné par le Père à tous les hommes, et cela pour leur salut, leur bien le plus profond, la Plénitude de leur vie… Telle est toute son œuvre : nous conduire à cette Plénitude pour nous permettre de découvrir « où » se cache le vrai bonheur… « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. Nul ne vient au Père que par moi… Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix… Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite… Heureux ceux qui croient sans avoir vu » (Jn 14,6 ; 14,27 ; 15,11 ; 20,29)…

Et cette conscience d’être donné par le Père pour le bonheur éternel de tous, si du moins nous l’acceptons, se joint aussi à son désir, infiniment libre, de se donner lui-même tout entier pour le salut de tous, et cela gratuitement, par amour : « Nul n’a plus grand amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis. Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je vous commande » (Jn 15,14), c’est-à-dire si vous acceptez de tout cœur de recevoir le Don que je fais de moi-même pour vous… En effet, ce Don déjà réalisé, déjà offert, n’atteindra pleinement son objectif que si nous acceptons de le recevoir. Et cela, personne ne le fera à notre place. L’Amour est en effet respect infini pour chacun d’entre nous : il ne peut nous obliger, nous contraindre d’accepter son Amour. Cela ne peut qu’être le résultat d’un consentement libre de notre part… « Consentir, c’est être sauvé » (St Bernard)…

Ainsi, Jésus a conscience qu’il est cet enfant donné par le Père pour chacun d’entre nous, pour notre salut à tous, et il adhère totalement à cette perspective en se donnant lui-même avec joie… Mais il a aussi conscience que cette faculté de se donner pour tous est encore en Lui un Don du Père… C’est le Père qui lui donne de pouvoir se donner, et lui, de son côté, dit « Oui ! », de tout son cœur… « C’est pour cela que le Père m’aime, parce que je dépose ma vie pour la recevoir de nouveau. Personne ne me l’enlève ; mais je la dépose de moi-même. J’ai pouvoir de la déposer et j’ai pouvoir de la recevoir de nouveau ; tel est le commandement que j’ai reçu de mon Père » (Jn 10,17-18). « Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même », disait Ste Thérèse de Lisieux. C’est ce que Jésus fera, jusqu’au bout, « jusqu’à l’extrême » (Jn 13,1). Peu avant de vivre sa Passion, il instituera en effet l’eucharistie en disant : « Ceci est mon corps, donné pour vous » (Lc 22,19). Et, nous dit Jésus dans les Actes des Apôtres, « il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir » (Ac 20,35)… Ces quelques lignes nous permettent de percevoir à quel point la représentation du Christ devant laquelle St François Xavier, Patron du Diocèse de la Réunion, priait lorsqu’il était enfant était proche de la réalité…

Prions : A Noël, cet enfant emmailloté et déposé dans une mangeoire nous dit déjà, sans un mot : « Je me donne tout entier à vous, pour votre bien, votre vie, votre Plénitude. Si vous acceptez de recevoir ce Don gratuit, en vous détournant de cœur, avec mon aide, de tout ce qui lui est contraire, alors, « je vous le déclare : il y a plus de joie au Ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour 99 justes qui n’ont pas besoin de se repentir », ou du moins qui sont assez aveugles sur eux-mêmes pour le croire (Lc 15,7)… Seigneur, accorde nous la grâce de te recevoir, de tout cœur, en vérité… Ta Vie, ta Lumière et ta Paix seront alors en nous notre plus beau cadeau de Noël…

Diacre Jacques Fournier – Avent 2017 – jeudi 21 décembre 2017

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