Au cours de la Passion, lors de l’arrestation de Jésus à Gethsémani, Simon Pierre, impulsif, a coupé l’oreille droite de Malchus, serviteur du grand-prêtre. Malchus se sentait en sécurité et en force face à Jésus et aux trois disciples réunis avec leur maître : Pierre, Jacques et Jean. Il avait sous-estimé la violence du chef des apôtres.

Mais Jésus a guéri Malchus en lui remettant l’oreille (Cf. Lc 22,51). C’est saint Luc, l’évangéliste de la miséricorde, qui nous raconte cette guérison en citant en même temps les paroles de Jésus aux gardes du Temple : « Suis-je un brigand, que vous vous soyez mis en campagne avec des glaives et des bâtons ? Alors que chaque jour j’étais avec vous dans le Temple, vous n’avez pas porté les mains sur moi. Mais c’est votre heure et le pouvoir des Ténèbres. » (Lc 22, 52-53).

Jésus, Roi-Messie, n’intervient pas à la manière des militaires ou des révolutionnaires politiques. Son royaume n’est pas de ce monde : « Si mon royaume était de ce monde, mes gens auraient combattu pour que je ne sois pas livré aux Juifs. Mais mon royaume n’est pas d’ici. » (Jn 18, 36).

Que dit le catholicisme sur la non-violence ? Quels sont ses arguments ? Quelle analyse fait-il de la violence ? Quelles sont ses propositions ?

Violence omniprésente

Tout d’abord, il n’y a pas de société sans violence. C’est un constat, l’homme s’est avéré violent depuis le commencement du monde. Pensons au meurtre d’Abel par son frère Caïn, raconté dans le premier livre de la Bible, la Genèse. Les civilisations s’évertuent à limiter et à gérer l’agressivité humaine par le droit, la culture et l’éducation. Les religions aussi.

Il serait trop simpliste et erroné de penser que ce sont uniquement les religions qui ont été les causes des guerres dans l’histoire. L’athéisme et les idéologies comme le marxisme et le nazisme ont fait des millions de morts.

Aujourd’hui, les chrétiens subissent la violence et l’exclusion dans certaines parties du monde. Au Moyen-Orient, les chrétiens qui étaient 20% de la population ne sont à l’heure actuelle que 4%. Ils sont persécutés et chassés de leur propre pays où ils résident depuis vingt siècles. La situation actuelle de l’Irak en est un exemple tragique. D’autres religions souffrent aussi des persécutions atroces. Le pape François ainsi que tous les chrétiens dénoncent cette situation inhumaine et ils appellent la Communauté internationale à ne pas rester passive devant de tels crimes inacceptables. Le pape François parle même de « paganisme de l’indifférence ».

Jésus de Nazareth

Pour les catholiques, la référence fondamentale de leur foi et de leur agir est bien Jésus de Nazareth, mort sur une croix et ressuscité d’entre les morts. Leader de la non violence, Jésus subit le supplice des esclaves : la croix. Ce faisant, il accomplit la prophétie d’Isaïe : « Objet de mépris, abandonné des hommes, homme de douleur, familier de la souffrance, comme quelqu’un devant qui on se voile la face, méprisé, nous n’en faisions aucun cas. Or ce sont nos souffrances qu’il portait et nos douleurs dont il était chargé. Et nous, nous le considérions comme puni, frappé par Dieu et humilié. Mais lui, il a été transpercé à cause de nos crimes, écrasé à cause de nos fautes. Le châtiment qui nous rend la paix est sur lui et dans ses blessures nous trouvons la guérison. (…) Maltraité, il s’humiliait, il n’ouvrait pas la bouche, comme l’agneau qui se laisse mener à l’abattoir, comme devant les tondeurs une brebis muette, il n’ouvrait pas la bouche » (Isaïe 53, 3-7). Pour les chrétiens, Jésus, Fils de Dieu, s’est abaissé en devenant homme comme nous jusqu’au dépouillement absolu de la mort. Il n’a pas imposé sa force divine. Il ne s’est pas vengé de ses ennemis. Tout au contraire, il a vaincu le mal par le bien, la haine par l’amour, la mort par sa mort dans la victoire de sa résurrection. Sur le Calvaire, il a intercédé pour ses ennemis : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font » (Luc 23,33).

Le pape François

Pour le pape François, « nous sommes en guerre mais il n’y a pas de guerre de religions. Les religions veulent la paix ». « Seule la paix est sainte, pas la guerre ! »

Lors de la rencontre interreligieuse d’Assise (Italie) pour la paix, le 20 septembre 2016, tous les participants ont déclaré : « La paix est le nom de Dieu. Celui qui invoque le nom de Dieu pour justifier le terrorisme, la violence et la guerre, ne marche pas sur sa route ».

Propositions pour grandir dans la paix

  • La paix est inséparable de la justice. Sans justice point de paix. Comme le dit le Psaume 85 : « Amour et vérité se rencontrent ; justice et paix s’embrassent » (Ps 85, 11).
  • Ne pas transmettre la haine dans les familles et dans l’enseignement scolaire. N’avez-vous pas constaté que beaucoup de conflits ont été nourris par des propos et des clichés transmis de père en fils ? Des guerres trouvent leurs racines dans les préjugés véhiculés dans les familles.

Il convient aussi de revoir la présentation des religions dans les manuels d’histoire pour ne pas graver dans la mémoire des enfants le désir de la vengeance. Le saint pape Jean-Paul II avait demandé pardon pour les violences infligées par des chrétiens au cours de l’histoire ou pour leur manque de réaction face aux injustices. Il faut faire la vérité, reconnaître ses torts et repartir sur un chemin de réconciliation et non de guerre.

Le travail du dialogue inter religieux actuel devrait trouver place dans les manuels d’histoire à côté de la dénonciation des crimes commis au nom de Dieu. La liberté de conscience et de religion qui figure dans la Déclaration des droits de l’homme du 10 décembre 1948 devrait inspirer aussi d’autres religions à reconnaître leur non-respect des droits de l’homme dans l’histoire. L’aveu des erreurs et des péchés grandit l’homme, les religions et les civilisations.

Catholique veut dire universel. Pour travailler au service de la Paix, les catholiques vivent, parlent et agissent ensemble avec les hommes de bonne volonté. Le pape François en a donné l’exemple à Bangui (Centre-Afrique) en se déplaçant avec un iman dans des quartiers dangereux de la ville pour témoigner précisément de cette manière d’agir en artisans de paix : être, parler et agir ensemble.

 

Fr. Manuel Rivero O.P. – Temps de Carême – Mardi  27 mars 2018

Aumônier du centre pénitentiaire de Domenjod (Saint-Denis. La Réunion).

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