Prédication disponible en format audio.

« Il n’y a ici ni pain, ni eau, et nous sommes dégoûtés de la manne, cette nourriture misérable ! » (Désespérantes paroles d’un peuple en souffrance dans le livre des Nombres, au chapitre 21, verset 5)

 

Méditation de la Parole en ce Mardi 5 avril 2022 – Chemin de Carême

Israël endure les conséquences d’une désobéissance à l’Alliance. Le peuple élu vocifère contre Dieu et contre Moïse dans le désert. A des milliers de kilomètres d’ici, l’artillerie russe  pilonne, creusant des crevasses de désolation, y semant la mort. Et c’est un peuple, l’Ukraine, qui souffre des dures contraintes d’une guerre  effroyable car injustifiée au regard du droit international des peuples et des gens…

Que de souffrances ajoutées à nos propres souffrances ! « Dans l’océan des malheurs de ce monde, j’entrevois le long chemin de miséricorde que le Seigneur emprunte à nos côtés », écrivait saint Martin de Porrès, après une de ses longues heures de méditation devant le Saint Sacrement.* Que de cris ne poussons-nous pas, dans le tohu-bohu assourdissant de nos vies claudicantes, pour exprimer notre souffrance vers Dieu, qu’elle soit physique (maladies, infirmités), morale (violence, injustice) ou spirituelle (angoisse, nuit de la foi) ! 

Que dire devant une personne qui souffre ? Que faire devant une douleur, immense comme le cœur ? Une exhortation, la seule possible : prier ! « Quelqu’un est-il dans la souffrance ? Qu’il prie », recommande l’apôtre Jacques.** L’injonction du frère du Seigneur peut nous laisser perplexes. Nous savons en effet qu’il n’y a pas une réponse ou une prière toute prête. « La souffrance est personnelle, notait le cardinal Lustiger, le sens à donner aussi » (Homélie de Carême, 2003). Vous et moi la voyons loger sur la croix avec un Dieu qui s’offre par amour. Et le Père Guy Gilbert de surabonder : « Devant la souffrance et la mort, nous ne savons que ce nom : Jésus »***

Devant l’abîme de l’épreuve, il y a également cet autre mot qui refait surface : pourquoi ? Entendons Jésus qui en a fait une prière : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »**** Cri de révolte ou affirmation de foi véritable ? Comme l’enfant qui se sait aimé, le Fils s’en remet à son Père : « Père, je remets mon esprit entre tes mains. »***** Alors, suivons cet humble chemin de la prière confiante, simple invitation à tout risquer sur la divine miséricorde, comme l’a fait saint Augustin avec ces mots poignants : « Ah ! le pauvre être que je suis ! Aie pitié de moi, Seigneur, voici mes plaies que je ne cache point : tu es médecin, je suis malade ; tu es miséricordieux, j’ai de la misère. »******

 

Et si du puits de nos souffrances nous demandions au Seigneur de nous délivrer de nous-mêmes !

Je me souviens toujours, non sans émotion, de ces quelques mots d’une prière du Père Michel Quoist que mon grand-père, veuf très tôt, récitait fréquemment :

« Seigneur, je me traîne à tâtons, aveuglé. Je me heurte à mes propres parois, à mes propres limites. Je me blesse, j’ai mal. J’ai trop mal, et personne ne le sait car personne n’est entré chez moi. Je suis seul, immensément seul. »*******

Se tournant ensuite vers une statuette de la petite Thérèse de Lisieux, il l’implorait avec une infinie douceur :

« Thérèse, trésor de joie dans la souffrance et martyre d’amour du Cœur Sacré de Jésus, prie pour nous ».********

A présent, nous aussi, d’un cœur confiant, avec cette « suave expression de la foi » (Père Pierre Ceyrac),  prions ce Dieu qui nous aime et qui nous entend :

Dieu, viens à notre aide, Seigneur, à notre secours. Vois notre misère adossée aux supplications de ton peuple. N’abandonne pas ton petit troupeau qui te prie et espère. Que la puissance de ton Esprit nous délivre de nos souffrances. A l’obus meurtrier, à la balle assassine, au cocktail Molotov contre-attaquant, oppose le bouclier de l’amour et de la fraternité. Et que ton pain venu du ciel nous donne la vie éternelle.

Bonne et belle journée à tous. Retrouvons-nous une fois encore demain avec joie pour continuer, ensemble, à « grandir dans l’Espérance » sur notre chemin de Carême.

 

*Jacques Ambec, Saint Martin de Porrès au service de la compassion, Editions Tequi, 16 mai 2005

**Jacques 5, 13

*** Guy Gilbert, Un prêtre chez les loubards, Editions Stock,  Paris, 2003

**** Matthieu 27, 46

***** Luc 23, 46

****** Saint Augustin, Confessions X, 28

******* Michel Quoist, Prières, Les Editions Ouvrières, Paris, 1983, p. 129

******** Litanie des béatitudes de Sainte Thérèse de Lisieux

 

Le Mardi de la 5ème semaine de Carême – 5 avril – Jean-Marie Armand, Diacre permanent  

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