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Bonjour,

L’évangile de ce jour se situe sur la route de Jérusalem. Il débute par une annonce, celle de Jésus faite à ses douze disciples, du récit de sa Passion à venir, terme de sa vie terrestre.

La suite de cet évangile laisse perplexe, moi en tout cas, et me paraît un sujet de méditation peu évident. Bien sûr le sujet lui-même est vite compris, il s’agît de la grandeur de l’humilité acquise dans le Don de soi et l’effacement.

Cependant, les circonstances qui amènent à cette évidence ne sont pas banales. Elles ont pour déclencheur, dans l’évangile de Mathieu (Mt 20, 17-28), deux des douze disciples, Jacques et Jean, fils de Zébédée, mais également et en particulier leur mère.

Parmi les douze disciples, on peut imaginer une relation privilégiée de Jacques et Jean avec Jésus, au vu des « convocations particulières » que Jésus leur a adressées, ainsi qu’à Pierre, à plusieurs reprises.

Ils ont notamment été appelés par Jésus pour assister à la révélation de la Divinité du Christ au moment de la transfiguration, puis lors de l’épisode médité dans le 1er mystère douloureux du Rosaire, l’agonie de Jésus à Gethsémani, où il dit à ces 3 disciples : « Mon âme est triste à en mourir. Demeurez ici et veillez avec moi » (Mt 26,36-39).

Peu importe le caractère privilégié des relations, cette demande faite sur le chemin de Jérusalem par l’épouse de Zébédée, mère des deux disciples, apparaît comme une préfiguration de celle du Bon Larron sur le Golgotha, sauf que cette demande sera humble et venant d’un pêcheur repenti et mourant, reconnaissant le Fils de DIEU cloué comme lui sur la Croix, lui, Jésus, l’Innocent. Quel paradoxe !

Ce qui paraît terrible dans le récit de l’évangile du jour, c’est que les disciples ne doivent pas partager le martyre de Jésus, il n’était pas envisagé pour eux à cet instant, mais Jésus a bien détaillé les supplices cruels qu’il allait, lui, affronter, quand il leur dit :
« Voici que nous montons à Jérusalem. Le Fils de l’homme sera livré aux grands prêtres et aux scribes, ils le condamneront à mort et le livreront aux nations païennes pour qu’elles se moquent de lui, le flagellent et le crucifient ; le troisième jour, il ressuscitera».

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la réponse ou plutôt la demande qui suit cette déclaration ne traduit pas la compassion à laquelle un homme qui va mourir ainsi aurait bien besoin, de la part de disciples, frères…devenus amis.

Ça parait terrible. Il faut être Jésus pour accepter et supporter cela !

Peut-être la perspective de la résurrection du Christ a-t-elle dominé sur la réalité de l’incompréhensible douleur du sacrifice accepté et offert humblement ?

Quoi qu’il en soit, il y a donc une mère qui s’approche de Jésus avec ses deux fils et qui se prosterne devant lui pour lui faire une demande. Ça commence bien, un peu comme dans l’évangile du publicain et du pharisien (Luc – chapitre 18, versets 9 à 14).

La suite ressemble plus à un ordre qu’à une demande : « Ordonne que mes deux fils que voici siègent, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche dans ton royaume ».

Hou là là ! Ça peut nous rappeler notre cheminement personnel, cette exigence au crucifié, ou au Père, exprimée dans nos demandes, mais que l’on aurait du mal à qualifier de « Prière » ! Prier n’est pas exiger ni ordonner par procuration !

Voilà un thème de méditation qui touche là où ça fait mal. Il faudra s’en souvenir à la prochaine demande insistante que nous pourrions formuler dans nos « prières ». Il faudra sans doute vite nous rappeler, au moment de nos tentations de « captation » du bon vouloir de Dieu, de cet épisode de l’évangile. Il ne faudrait jamais oublier le début du texte qui annonce les souffrances et les épreuves du Salut et de l’Amour Donné, incarné en Jésus-Christ. Nos demandes devraient toujours avoir cet éclairage du Don absolu et Souffrant, car, sans ce regard sur la Croix, nos prières pourraient vite devenir des exigences coupables et ingrates. On ne possède pas un Dieu qui nous laisse libre et qui se donne par Amour.

La parole du pape François sur l’évangile du jeudi 23 février dernier, reprenant le thème de la passion et du portement de la croix, peux nous aider à y réfléchir, il dit :

« La tentation est toujours, aujourd’hui également, de vouloir suivre un Christ sans croix, ou plutôt d’enseigner à Dieu la bonne voie (…). Mais Jésus nous rappelle que sa voie, et la seule, est la voie de l’amour, et il n’y a pas de véritable amour sans le sacrifice de soi. »
Que Dire de plus ?

Puisque la résurrection passe par la Passion du Christ, n’oublions pas une chose que Jésus nous explique là : nous ne pourrions pas supporter autant d’humiliations, de rejets, d’injustices, de souffrances dans un Don total, cette coupe qu’a bue Jésus pour notre Salut. Il convient pour nous, d’accepter nos tribulations comme un chemin de purification et de sanctification.

Bien sûr, dans la peine, c’est évident, la souffrance et les difficultés ne sont pas joyeuses, mais portées avec la certitude de la Foi que Jésus partage avec nous le Joug et mesure le Poids du Fardeau que nous pouvons supporter, en tenant jusqu’au bout nous serons sauvés, Jésus nous l’a promis et il ne faut pas en douter.

Je ne suis pas capable d’exprimer l’intention de Jésus lorsqu’il dit : « Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur, et celui qui veut être parmi vous le premier sera votre esclave. »

Entrevoir des positions hiérarchiques, dans le but d’un classement et d’une performance humaine glorifiée, rappelle fort l’éducation actuelle qui pousse à concourir et être meilleur que son frère, quitte à le voir échouer par notre réussite.

Ce n’est bien sûr pas cette attitude que Jésus envisage pour ceux qui acceptent d’emprunter le chemin de Vie en portant leur Croix, bien au contraire.

Il sait que l’humilité ne cherche pas les honneurs et les premières places mais il annonce une vérité, parce qu’il est la Vérité.

Cette Vérité qui ne peut être contestée, est celle de la grandeur du service, et par la même, de celui qui, comme le fils de l’Homme, n’est pas venu pour être servi mais pour servir ses frères et sœurs, particulièrement ceux qui en ont le plus besoin, fraternellement, humblement.

Par comparaison, il me paraît intéressant de rappeler l’évangile de Marc, lu le 21 février dernier à la veille du mercredi des cendres, où le même épisode de la vie publique de Jésus a été relaté mais de manière un peu différente. Après l’annonce par Jésus aux douze disciples de sa Passion et de sa Résurrection, Marc indique :

« Mais les disciples ne comprenaient pas ces paroles et ils avaient peur de l’interroger.
    Ils arrivèrent à Capharnaüm,
et, une fois à la maison, Jésus leur demanda :
« De quoi discutiez-vous en chemin ? »
    Ils se taisaient, car, en chemin, ils avaient discuté entre eux pour savoir qui était le plus grand.
    S’étant assis, Jésus appela les Douze et leur dit :
« Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous. »
    Prenant alors un enfant, il le plaça au milieu d’eux, l’embrassa, et leur dit :
    « Quiconque accueille en mon nom un enfant comme celui-ci, c’est moi qu’il accueille.
Et celui qui m’accueille, ce n’est pas moi qu’il accueille, mais Celui qui m’a envoyé. »

  • Nous devons sans doute en déduire deux choses principales :
    Ne recherchons pas chez les autres les sentiments coupables qui offensent l’amour, personne n’est épargné, mais concentrons-nous en premier lieu à améliorer notre état personnel par une introspection honnête, dans une perspective de progrès et non de culpabilité sclérosante. Faisons notre part de chemin, humblement, dans un cœur à cœur régulier et sincère avec Dieu qui ne manquera pas de nous donner les grâces indispensables sans lesquelles un cœur endurci ne peut changer.
  • Méditons la joie d’un enfant confiant, innocent, qui ne comprend les relations qu’en termes d’Amour Donné sans calcul, librement, et qui se jette dans les bras de l’être aimé. Croyons que c’est le Don de Dieu – Dieu lui-même- que nous accueillons, et aimons de tout notre cœur.
    Puissent nos prières de carême intégrer cet amour donné dans le service et l’accueil de tous nos frères et sœurs et des tout- petits, puissions-nous les servir fraternellement et affectueusement.

Mercredi de la deuxième semaine de Carême – 8 mars 2023 – Patrick, Fraternité Lataste.

Vous pouvez nous envoyer vos demandes de grâces et intentions de prière en répondant dans l’espace de commentaires. Nous vous invitons aussi à partager cette méditation avec vos amis.

 
 

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