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Je dois avouer que l’évangile de ce jour reflète pour moi Dieu dans toutes sa splendeur. On a coutume de présenter cette parabole de Saint Luc au chapitre 15 comme étant la parabole du fils prodigue, mais on pourrait plutôt dire que c’est la parabole de Dieu prodigue.

Si l’on regarde la définition du mot prodigue, le dictionnaire LAROUSSE nous dit que prodigue signifie « qui dépense sans compter, follement ». Mais, n’est pas ce que Dieu fait pour l’homme ?

Cette parabole de l’Evangile de Saint Luc, nous présente un jeune homme qui considère son père comme un obstacle à son bonheur. Il s’en va dilapider son héritage au loin en menant une vie de désordre. Pris entre la fidélité à son père et la pression de la bande des soi-disant amis, il choisit la bande, et part s’amuser avec tout ce que le monde peut offrir de plaisirs si souvent futiles. Il se retrouve très vite dans un pays lointain dans la pire déchéance qui soit en expérimentant la misère des pauvres et des rejetés. Ce fils cadet commence alors à mesurer la chance qu’il avait et le gâchis qui s’en est suivi par les conséquences de sa décision. Mis devant la dureté du réel avec ses seules forces, il abandonne toute arrogance et décide de revenir vers son père.

Cette histoire est encore d’actualité de nos jours, elle est celle de beaucoup d’entre nous, de tous les naufragés spirituels. En effet, combien d’entre nous ont commencé par gaspiller l’héritage du Père avant d’avoir faim ; alors on devient esclave. Ce passage de l’Evangile nous donne un magnifique exemple de ce que doit être le retour vers Dieu. Quand vient le face à face, le moment de vérité, du plus profond de notre misère on se tourne vers Dieu, et l’on revient au Père, source de l’amour et de la paix.

Ici le fils cadet est revenu vers son père. On peut se demander si il revenu uniquement parce qu’il avait faim ou bien parce qu’il a fait l’expérience d’une véritable contrition. Quand vient la vraie contrition, on se lève, on se met en marche vers le Père, sûr d’avance qu’on sera écouté, compris, pardonné, parce qu’on est certain d’être aimé d’un amour avec un grand A et sans limite. On ne se désole plus tellement d’avoir écorné l’image de soi-même que d’avoir terni en soi l’image de Dieu et d’avoir blessé l’amour d’un Père qui nous a voulus libres. Le cœur de Dieu est bouleversé de voir ses enfants malheureux croire plus à son amour qu’à leur propre misère.

Dans cette parabole, il y a aussi le fils ainé. Est-il moins aimé parce qu’il est moins misérable ? On peut le penser parfois, mais c’est mal comprendre les paroles du père. Malgré sa fidélité auprès du père, l’aîné n’a pas compris comment réagit le cœur d’un père. Il est resté bloqué sur les fautes de son frère tandis que le père avait depuis longtemps ouvert les bras. Sur le plan de la justice stricte, l’aîné raisonne juste, et son réflexe est compréhensible. Il parle de droit, de faiblesse paternelle, de manque d’autorité. Le père, lui, ne répond pas à ce niveau, qui ne débouche pas sur la vie. Il reprend, paisiblement, les mots tout simples et sublimes de l’amour et de la réciprocité : « Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. Il fallait festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé ! ». L’ainé a l’amour du père, il a tout ! Et cela vaut plus que toutes les fortunes, toutes les fêtes et toutes les aventures! Que pourrait-il chercher de plus ailleurs ?

Le tort du fils aîné, c’est de se sentir frustré parce que son père fait miséricorde. Il brouille par sa jalousie l’œuvre du père, qui n’est que générosité et pardon.

C’est bien le père qui est au centre de la parabole. Il laisse faire le plus jeune et accepte ses revendications, sans savoir jusqu’où celui-ci ira dans sa soif de plaisir. Le cadet est poussé par un besoin d’autonomie, et son père lui en laisse le risque. Mais le père ne cesse pas d’attendre, parce qu’il ne cesse pas d’aimer. Ne plus l’avoir près de lui, c’est comme s’il était mort.

D’un point de vue humain, on peut penser que le père organise une fête disproportionnée. Mais, d’un point de vue divin, cela est tout à fait proportionnée à son amour de père, qui n’est mesuré par rien. Il est dit dans cette Evangile : « Il fallait bien festoyer et se réjouir, puisque ton frère que voilà était mort et il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé ! » (Lc 15, 32).

 

Pour aller plus loin dans ce cheminement de carême, on pourrait essayer de réfléchir à ces questions :

Pourquoi le pardon serait-il moins puissant dans le cœur d’un frère que dans celui d’un père ? Pourquoi parlerions-nous obstinément de justice et de sévérité, quand Dieu veut nous inculquer son parti pris de miséricorde ?

Pourquoi fermerions-nous notre cœur au frère qui revient, alors que son retour fait toute la joie de Dieu ?

 

En ce chemin de carême, nous pouvons tout simplement adresser cette prière à Notre Seigneur :

Seigneur Jésus, ouvres mon cœur pour pardonner et accueillir l’autre qui revient. Apprends-moi à être miséricordieux comme toi tu es miséricordieux.

 

Erick Bernon, laic – Chemin de Carême – Samedi 3 mars 2018

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